[article] Titre : | Éditorial :Pour une synodalité missionnaire | Type de document : | texte imprimé | Auteurs : | François Xavier Amherdt (1957-....), Auteur | Année de publication : | 2022 | Article en page(s) : | p.367 - 370 | Langues : | Français | Note de contenu : | a synodalité ? Un effet de mode, passager selon certains. Qui va s’estomper lorsque l’actuel souverain pontife aura achevé sa course.
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En s’inscrivant dans le vaste processus de préparation mondiale catholique voulu par le pape François en vue du Synode des évêques consacré à cette thématique et finalement déplacé à octobre 2023 à Rome, le présent numéro souhaite établir que l’Église est synodale, ou elle n’est pas fidèle à son essence. Et que la synodalité, bien au-delà des seules questions de structure et de fonctionnement — qui ont bien sûr leur importance — constitue une caractéristique fondamentale de l’Église, pour son rayonnement missionnaire au service de la joie de l’Évangile. Le titre même de l’assemblée des évêques le signale très clairement : « Pour une Église synodale : communion, participation et mission ».
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Dans son indispensable contribution liminaire, Rossano Sala (UP salésienne, Rome), consulteur du Secrétariat général du Synode des évêques, invite à étudier le document de la Commission théologique internationale (CTI) de mars 2018, intitulé La synodalité dans la vie et la mission de l’Église, en guise de « carte de navigation » pour toute la phase préparatoire de la 16e Assemblée générale du Synode de 2023 et au-delà, en complémentarité avec la future (probable) exhortation apostolique post-synodale (« Un excellent point de départ : invitation à la lecture d’un récent document sur la synodalité »).
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Il s’agit ensuite de dégager le paradigme scripturaire de la synodalité, sans le réduire à des processus démocratiques ou managériaux (Luc Forestier, Institut catholique de Paris). Outre l’assemblée de Jérusalem (Actes 15) et les premiers lieux de dialogue de l’Église primitive, c’est la genèse du canon des Écritures qui fournit l’exemple le plus probant et original d’une synodalité effective (« “Ecclesia peregrinans”. La nature biblique de la synodalité »).
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La synodalité et la participation des baptisés ne peuvent rester de simples leitmotivs et slogans extérieurs. C’est si elles sont réellement exercées et mises en œuvre sans la crainte de changements ainsi occasionnés qu’elles peuvent devenir le « style » intérieur de l’auto-compréhension ecclésiale. Salvatore Loiero (Faculté de théologie de Fribourg) plaide pour des processus effectifs d’apprentissage synodaux et participatifs, de manière à déployer une Église crédible, signe de la Bonne Nouvelle du « Dieu très humain », comme le dit Edward Schillebeeckx (« Synodalité et participation. Possibles réalités ou réelles possibilités de l’Église »).
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Dans une perspective phénoménologique et anthropologique prometteuse, Salvatore Currò (UP salésienne, Rome) met l’accent sur la préposition « avec » du terme sun-odos. Comme dans le mot même de « syn-ode », l’« avec » nous précède au niveau existentiel, sensible et corporel comme provocation continuelle à la réconciliation avec les autres, avec soi-même et avec Dieu. Nous y répondons par une pratique de l’action de grâce, de l’abandon et de la confiance qui précèdent l’activité. D’où la nécessité de cheminer ensemble, de « syn-oder », pour relever ce défi humain, culturel et ecclésial (« Le défi de l’“avec” ou la pratique de “syn-oder” »).
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Fort de sa double expérience en tant qu’expert lors des Synodes de 2015 et de 2018, l’ancien recteur de l’Institut catholique de Paris, désormais président de l’Institut pontifical de théologie Jean-Paul II pour les sciences du mariage et de la famille à Rome, Philippe Bordeyne, souligne de manière originale, en recourant à l’encyclique du pape François Fratelli tutti, l’importance pour le processus synodal des liens d’amitié sociale établis au niveau local, car ils permettent d’entrer concrètement et progressivement dans une fraternité à l’échelle universelle respectueuse des différences. Ce faisant, il est possible de mieux intégrer les familles et leurs savoir-faire dans la dynamique synodale, et d’ouvrir ces dernières à des pratiques susceptibles d’ouvrir leurs horizons. Cela peut aider à conjuguer le global et le local dans la réflexion sur la synodalité missionnaire, dans la mesure où la mission vise à rencontrer l’homme véritable et concret et qu’elle a besoin de repères solides pour ne pas céder aux idéologies fallacieuses et trop englobantes de l’amour universel (« Synodalité, famille et amitié sociale »).
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Lui-même expert pour la méthodologie de la prochaine Assemblée générale du Synode des évêques de 2023, le professeur de théologie pratique de l’UCLouvain et directeur de la revue Lumen Vitae, Arnaud Join-Lambert, ouvre la deuxième grande section du numéro par un article sur la nouveauté ecclésiologique et pastorale apportée par les Synodes diocésains postconciliaires, à partir de la notion d’innovation religieuse en quatre étapes : proposition, diffusion, appropriation et adoption. Face aux résistances que rencontre souvent le processus d’adoption, et laisse ainsi un goût d’inachevé, il propose quatre pistes de réforme de nature théologique pour y remédier, quant aux consultations, aux modalités de la prise de décision, aux formes de la célébration et au style épiscopal synodal requis (« L’innovation inachevée du Synode diocésain postconciliaire »).
9
Élargissant l’horizon, la nouvelle sous-secrétaire générale du Synode des évêques, Nathalie Becquart, en compagnie du professeur à l’Université catholique Andrés Bello de Caracas et au Boston College, et expert au CELAM et à la CLAR (Confédération latinoaméricaine des religieux), Rafael Luciani, explore le premier niveau de synodalité qu’est l’Église locale dans son rapport avec son contexte culturel, et établit ainsi un panorama d’expériences synodales en différents continents (Synodes diocésains, assemblées nationales et conciles pléniers), selon leur dynamique d’inculturation. S’en dégage un modèle de l’Église universelle fidèle à Vatican II, en tant que communion d’Églises (« Synodalité et cultures : des expériences diverses selon les continents »).
10
Tous deux engagés au Département de la formation de l’Église catholique dans le canton de Vaud (Suisse romande), Gregory Solari et Philippe Becquart font état de « l’aventure » de la synodalité entreprise dans plusieurs équipes pastorales vaudoises, en en dégageant une conviction : la synodalité implique une conversion pastorale, une nouvelle manière d’être et d’agir, une correction du réflexe de délégation, en vertu de la grâce baptismale et du sensus fidei qui en découle, puisque ce sont les représentations de l’Église et des ministères qui conditionnent la possibilité même de la synodalité (« L’aventure de la synodalité. Échos d’une expérience de “chemin synodal” de l’Église catholique du canton de Vaud en Suisse »).
11
Quant au théologien en pastorale du Jura pastoral, Christophe Wermeille, il présente la manière singulière de vivre la synodalité en Suisse, marquée par la culture politique helvétique, son sens de la démocratie et du fort engagement citoyen. Il y décrit un certain nombre de choix prophétiques posés de longue date dans le diocèse de Bâle pour développer une organisation ecclésiale ouverte à une diversité d’engagements et à des responsabilités partagées : des ministères exercés par des laïcs, responsables parfois de communautés ou d’unités pastorales, potentiels bénéficiaires d’une institution liturgique et collaborant avec prêtres, diacres et laïcs au sein d’équipes pastorales, des conseils de réflexion au pouvoir décisionnel aux différents niveaux du diocèse (« Synodalité en Suisse : ou quand la démocratie s’invite en Église… »).
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Puis, dans sa troisième et ultime séquence, le numéro achève son déroulé par un essai audacieux du chargé de cours et aumônier de clinique universitaire à l’UCLouvain, Claude Lichtert, qui, face au pessimisme ambiant et à la quête de pertinence ecclésiale, évoque un ancrage triple dans la théologie de l’Alliance pour retrouver cette crédibilité de l’Église : la lecture partagée de la Bible, la participation active à la préoccupation écologique sociétale et l’hospitalité mutuelle en toutes circonstances (« Trois suggestions pour une Église en déshérence et en quête de cohérence et de pertinence »).
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Le numéro fait donc droit à la complémentarité des sensibilités et des approches culturelles (française, belge, germanique, italienne, helvétique et sud-américaine) qui essaient elles-mêmes de « syn-oder » (selon le néologisme suggéré par S. Currò).
| Permalink : | http://bibliothequeucm.educassist.mg/opac_css/index.php?lvl=notice_display&id=57 | in Lumen vitae > Vol.LXXVI/4 (Octobre-Novembre-Décembre 2021-4) . - p.367 - 370
[article] Éditorial :Pour une synodalité missionnaire [texte imprimé] / François Xavier Amherdt (1957-....), Auteur . - 2022 . - p.367 - 370. Langues : Français in Lumen vitae > Vol.LXXVI/4 (Octobre-Novembre-Décembre 2021-4) . - p.367 - 370 Note de contenu : | a synodalité ? Un effet de mode, passager selon certains. Qui va s’estomper lorsque l’actuel souverain pontife aura achevé sa course.
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En s’inscrivant dans le vaste processus de préparation mondiale catholique voulu par le pape François en vue du Synode des évêques consacré à cette thématique et finalement déplacé à octobre 2023 à Rome, le présent numéro souhaite établir que l’Église est synodale, ou elle n’est pas fidèle à son essence. Et que la synodalité, bien au-delà des seules questions de structure et de fonctionnement — qui ont bien sûr leur importance — constitue une caractéristique fondamentale de l’Église, pour son rayonnement missionnaire au service de la joie de l’Évangile. Le titre même de l’assemblée des évêques le signale très clairement : « Pour une Église synodale : communion, participation et mission ».
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Dans son indispensable contribution liminaire, Rossano Sala (UP salésienne, Rome), consulteur du Secrétariat général du Synode des évêques, invite à étudier le document de la Commission théologique internationale (CTI) de mars 2018, intitulé La synodalité dans la vie et la mission de l’Église, en guise de « carte de navigation » pour toute la phase préparatoire de la 16e Assemblée générale du Synode de 2023 et au-delà, en complémentarité avec la future (probable) exhortation apostolique post-synodale (« Un excellent point de départ : invitation à la lecture d’un récent document sur la synodalité »).
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Il s’agit ensuite de dégager le paradigme scripturaire de la synodalité, sans le réduire à des processus démocratiques ou managériaux (Luc Forestier, Institut catholique de Paris). Outre l’assemblée de Jérusalem (Actes 15) et les premiers lieux de dialogue de l’Église primitive, c’est la genèse du canon des Écritures qui fournit l’exemple le plus probant et original d’une synodalité effective (« “Ecclesia peregrinans”. La nature biblique de la synodalité »).
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La synodalité et la participation des baptisés ne peuvent rester de simples leitmotivs et slogans extérieurs. C’est si elles sont réellement exercées et mises en œuvre sans la crainte de changements ainsi occasionnés qu’elles peuvent devenir le « style » intérieur de l’auto-compréhension ecclésiale. Salvatore Loiero (Faculté de théologie de Fribourg) plaide pour des processus effectifs d’apprentissage synodaux et participatifs, de manière à déployer une Église crédible, signe de la Bonne Nouvelle du « Dieu très humain », comme le dit Edward Schillebeeckx (« Synodalité et participation. Possibles réalités ou réelles possibilités de l’Église »).
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Dans une perspective phénoménologique et anthropologique prometteuse, Salvatore Currò (UP salésienne, Rome) met l’accent sur la préposition « avec » du terme sun-odos. Comme dans le mot même de « syn-ode », l’« avec » nous précède au niveau existentiel, sensible et corporel comme provocation continuelle à la réconciliation avec les autres, avec soi-même et avec Dieu. Nous y répondons par une pratique de l’action de grâce, de l’abandon et de la confiance qui précèdent l’activité. D’où la nécessité de cheminer ensemble, de « syn-oder », pour relever ce défi humain, culturel et ecclésial (« Le défi de l’“avec” ou la pratique de “syn-oder” »).
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Fort de sa double expérience en tant qu’expert lors des Synodes de 2015 et de 2018, l’ancien recteur de l’Institut catholique de Paris, désormais président de l’Institut pontifical de théologie Jean-Paul II pour les sciences du mariage et de la famille à Rome, Philippe Bordeyne, souligne de manière originale, en recourant à l’encyclique du pape François Fratelli tutti, l’importance pour le processus synodal des liens d’amitié sociale établis au niveau local, car ils permettent d’entrer concrètement et progressivement dans une fraternité à l’échelle universelle respectueuse des différences. Ce faisant, il est possible de mieux intégrer les familles et leurs savoir-faire dans la dynamique synodale, et d’ouvrir ces dernières à des pratiques susceptibles d’ouvrir leurs horizons. Cela peut aider à conjuguer le global et le local dans la réflexion sur la synodalité missionnaire, dans la mesure où la mission vise à rencontrer l’homme véritable et concret et qu’elle a besoin de repères solides pour ne pas céder aux idéologies fallacieuses et trop englobantes de l’amour universel (« Synodalité, famille et amitié sociale »).
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Lui-même expert pour la méthodologie de la prochaine Assemblée générale du Synode des évêques de 2023, le professeur de théologie pratique de l’UCLouvain et directeur de la revue Lumen Vitae, Arnaud Join-Lambert, ouvre la deuxième grande section du numéro par un article sur la nouveauté ecclésiologique et pastorale apportée par les Synodes diocésains postconciliaires, à partir de la notion d’innovation religieuse en quatre étapes : proposition, diffusion, appropriation et adoption. Face aux résistances que rencontre souvent le processus d’adoption, et laisse ainsi un goût d’inachevé, il propose quatre pistes de réforme de nature théologique pour y remédier, quant aux consultations, aux modalités de la prise de décision, aux formes de la célébration et au style épiscopal synodal requis (« L’innovation inachevée du Synode diocésain postconciliaire »).
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Élargissant l’horizon, la nouvelle sous-secrétaire générale du Synode des évêques, Nathalie Becquart, en compagnie du professeur à l’Université catholique Andrés Bello de Caracas et au Boston College, et expert au CELAM et à la CLAR (Confédération latinoaméricaine des religieux), Rafael Luciani, explore le premier niveau de synodalité qu’est l’Église locale dans son rapport avec son contexte culturel, et établit ainsi un panorama d’expériences synodales en différents continents (Synodes diocésains, assemblées nationales et conciles pléniers), selon leur dynamique d’inculturation. S’en dégage un modèle de l’Église universelle fidèle à Vatican II, en tant que communion d’Églises (« Synodalité et cultures : des expériences diverses selon les continents »).
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Tous deux engagés au Département de la formation de l’Église catholique dans le canton de Vaud (Suisse romande), Gregory Solari et Philippe Becquart font état de « l’aventure » de la synodalité entreprise dans plusieurs équipes pastorales vaudoises, en en dégageant une conviction : la synodalité implique une conversion pastorale, une nouvelle manière d’être et d’agir, une correction du réflexe de délégation, en vertu de la grâce baptismale et du sensus fidei qui en découle, puisque ce sont les représentations de l’Église et des ministères qui conditionnent la possibilité même de la synodalité (« L’aventure de la synodalité. Échos d’une expérience de “chemin synodal” de l’Église catholique du canton de Vaud en Suisse »).
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Quant au théologien en pastorale du Jura pastoral, Christophe Wermeille, il présente la manière singulière de vivre la synodalité en Suisse, marquée par la culture politique helvétique, son sens de la démocratie et du fort engagement citoyen. Il y décrit un certain nombre de choix prophétiques posés de longue date dans le diocèse de Bâle pour développer une organisation ecclésiale ouverte à une diversité d’engagements et à des responsabilités partagées : des ministères exercés par des laïcs, responsables parfois de communautés ou d’unités pastorales, potentiels bénéficiaires d’une institution liturgique et collaborant avec prêtres, diacres et laïcs au sein d’équipes pastorales, des conseils de réflexion au pouvoir décisionnel aux différents niveaux du diocèse (« Synodalité en Suisse : ou quand la démocratie s’invite en Église… »).
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Puis, dans sa troisième et ultime séquence, le numéro achève son déroulé par un essai audacieux du chargé de cours et aumônier de clinique universitaire à l’UCLouvain, Claude Lichtert, qui, face au pessimisme ambiant et à la quête de pertinence ecclésiale, évoque un ancrage triple dans la théologie de l’Alliance pour retrouver cette crédibilité de l’Église : la lecture partagée de la Bible, la participation active à la préoccupation écologique sociétale et l’hospitalité mutuelle en toutes circonstances (« Trois suggestions pour une Église en déshérence et en quête de cohérence et de pertinence »).
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Le numéro fait donc droit à la complémentarité des sensibilités et des approches culturelles (française, belge, germanique, italienne, helvétique et sud-américaine) qui essaient elles-mêmes de « syn-oder » (selon le néologisme suggéré par S. Currò).
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